dimanche 20 juillet 2008

On les voit le sourire aux lèvres...

Ca ne vous ai jamais arrivé à vous? Vous êtes tranquillement assis dans le métro en train de feuilleter un magazine ou dévorant un livre et vous êtes perturbés dans votre lecture par votre voisin qui marmonne.
Vous jetez un coup d'oeil à votre droite : votre voisin est simplement en train de consulter son portable. Vous retournez alors à votre lecture et les marmonnements reprennent. Un nouveau coup d'œil à droite : " Il parle tout seul ou quoi mon voisin? " et là c'est le déclic :
" aahh mais il est au téléphone". Les écouteurs reliés au téléphone auraient dû vous mettre la puce à l'oreille!

J'avoue, je suis peut-être bêtement accrochée aux conventions que requièrent toute conversation téléphonique mais où sont passés les usuels "allos", " comment ça va? " qui accompagnent le début de toute conversation et adoucissent l'intrusion dans la vie de l'interlocuteur.
Ces nouveaux communicateurs mobiles semblent reprendre tout naturellement une conversation "réelle" interrompue un peu plus tôt. Il y a des chuchotement, des silences - qui nous laissent croire à tort que la conversation est finie-. Le rythme des phrases, de la conversation est exactement celle d'une conversation en face-à-face à la différence près qu'ils manquent la gestuelle, l'expression du visage qui en disent plus que les mots.

La sonnerie ne retentit plus, la conversation s'arrête comme elle a commencé. ils partagent leur moindre moment de la journée...et nous avec.
Attardez-vous sur votre voisin, ses gestes, son regard sont adoucis comme feutrés. Il est à nouveau dans son salon. On imagine la personne à l'autre bout du fil en train de faire la vaisselle, le ménage, dans son train-train quotidien qui devrait pourtant nous être étranger.

Je vous l'accorde, le portable ne devrait être qu'un instrument qui sert la communication.
mais est-ce à dire que les circonstances, les lieux, notre environnement ne nous conditionnent plus, ne conditionnent plus nos discours, nos rapports aux gens?
Que je sois chez soi, au travail, dans le métro, je peux recréer ma bulle d'intimité au téléphone. Mes histoires de cœur, mes épanchements ont lieu d'être dans un lieu public? Serait-ce la fin de la nette distinction entre la sphère privée et la sphère publique?

On peut désormais tout partager, tout communiquer où l'on veut, quand on veut.
Peut-être que dans cette surenchère dans l'exposition personnelle, chacun cherche son quart d'heure de gloire. Rendre exceptionnel le quotidien dans ce qu'il offre de plus banal.
Mais ce serait trop simpliste de réduire cette soif de l'exposition, du partage instantané à cette hypothèse.

Je crois que l'on pourrait regarder également de ce côté : " Sommes-nous ce que faisons? " et surtout " sommes-nous SEULEMENT ce que nous faisons?"
Si nous prenons l'hypothèse que oui... en effet, il faut que tout ce que nous fassions soit sublimé. A peine vécu, déjà partagé, déjà publié, exposé. Comme si la non-exposition de nos dernières vacances, de nos soirées les rendait inexistantes ou pire sans intérêt. Ces moments ne comptent que parce qu'ils contribuent, participent de notre personnalité. En les partageant avec le maximum de personnes , nous y cherchons une sorte d'approbation et de status.

Tout est " EX", nous sommes génération "EX"
EX travertis
EX posés
EX petit-ami
EX trapolés
EX igeants

OUT?

Ce qui me mène tout logiquement à me demander, où en est le IN? mon moi, mon vrai, mon chez- moi, mon jardin secret, la confidence
IN vitation
IN touchable
Ces deux derniers mots touchent deux extrémités : tu peux venir mais tu ne m'auras pas, tu ne me saisiras pas, tu ne me cerneras pas. S'y mêle une certaine agressivité dans cette défense. On défend son territoire, son chez-soi.
Le monde les relations fonctionnerait comme une grande vitrine.
Regarde ce que j'ai fait le weekend dernier, qui je fréquente et je te dirais qui je suis... mais pas trop, sinon je n'existe plus. Respecter les codes pour faire partie de la mouvance mais savoir s'en distancer pour trouver sa place.

J'existe parce je fais ce que tu ne fais pas. J'existe parce que tu me regardes.
Le border-line est roi au royaume de la relativité.

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